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Caroline Lenain

Avocat au barreau de Lille


Épilogue d’une séance de « biflage » au lycée Jean-Moulin de Roubaix

Par FREDERICK LECLUYSE, pour Nord Eclair le 30 Octobre 2013


Le grand résistant dont l’établissement scolaire roubaisien porte le nom n’aurait jamais pu imaginer ça ! Ça ? C’est une bifle ! Comme le résume hier le président Mikaël Simoens, le terme (très populaire sur Internet) est issu de la contraction d’une gifle et d’un pénis dont la première lettre, écrit plus trivialement, serait un b.

Au tribunal de Lille, cette affaire de gifle virile avec un sexe est, en tout cas, une grande première judiciaire. Elle a pour cadre le lycée Jean-Moulin. Le 9 septembre dernier, les élèves en terminale bac pro sécurité reviennent d’une séance de sport. Il est 10 h. Dans le vestiaire, certains partent sous la douche. Un élève, décrit comme le souffre-douleur, préfère se changer rapidement.

« J’ai cru qu’ils blaguaient »

Trois de ses camarades (dont un mineur) lui tombent dessus. Tandis que deux le maintiennent au sol, un troisième le gifle à plusieurs reprises au visage avec son sexe. « Depuis le début de la séance de sport, ils disaient qu’ils allaient me bifler », racontera la victime, encore mineure. « J’ai cru qu’ils blaguaient. » Profondément humilié, le jeune homme décide de porter plainte. Convoqués devant le conseil de discipline, Amadou D. (le bifleur) et Justin D., 19 ans tous les deux, sont exclus définitivement du lycée. Hier, c’est pour agression sexuelle en réunion qu’ils sont poursuivis devant le tribunal.

« Mais pourquoi avez-vous fait ça ? », interroge le président. « C’était juste pour rigoler », répond Amadou D. « Cela n’avait pour moi aucune connotation sexuelle, c’était juste un jeu. Je n’ai pas pensé que ça pouvait être grave. »

« C’était pas méchant... »

Son camarade embraye. « C’était pas méchant, on voulait juste au départ aller le mettre sous la douche, un moment de rigolade, en fait... » Le président Simoens hausse le ton : « Nous ne sommes pas ici dans une cour de récréation, il y avait mieux à faire que d’humilier cet élève en lui faisant subir ce que vous avez fait. » Partie civile pour la victime, Me Olivier Péan de Ponfilly est complètement d’accord. « On ne peut être qu’affligé. Si ce n’est pas obscène, si ce n’est pas immoral, qu’est-ce c’est ? » L’avocat demande réparation.

Le procureur également. « Ce n’était pas un moment de rigolade, c’était au contraire une agression sexuelle particulièrement humiliante. » Jérôme Aimé requiert 4 mois avec sursis contre Amadou D. et 2 mois sous le même régime contre Justin D. En défense, Mes Caroline Lenain et Laurent Aboucaya ne sont pas d’accord sur le délit d’atteinte sexuelle. Ils estiment qu’il s’agit d’une simple violence, « une bêtise d’adolescents, un dérapage lié à l’immaturité des deux lycéens... » Jugement le 3 décembre.